Carhaix-Brest-Loudéac (PBP 2/3)
Mardi 18 aout 2015, minuit Carhaix-Plouguer, Finistère
Il est presque minuit quand je prends place dans le dortoir. On nous donne un drap, je suis un peu surprise , je pensais plutôt à des couvertures, comme dans les refuges de montagne.
Ca ronfle un peu dans le coin, mais ça ne me gêne pas, à la suite d'une nuit et d'une journée de pédalage en continu, et je m'endors rapidement. Pour me réveiller 1h30 plus tard en grelottant. Brrrrrrr …. je voudrais tant une couverture … même une sale … une qui sent le chacal . Même une sale qui sent le chacal avec le chacal dedans s'il faut, il me tiendrait chaud …. je mets mon buff sur ma tête , je m'enroule dans le drap du mieux possible mais le froid m'empêche de dormir … en même temps je suis furieuse car ce sont des heures perdues qui ne me permettent pas de récupérer …
Le seul avantage est que je me lève facilement à 3H30, je répare ma crevaison. Toutefois je suis un peu vaseuse (et encore gelée) , et quand je retrouve Séverine je lui fais part de mon besoin impératif de prendre un café et de manger un morceau avant de démarrer . Elle part devant et je la rejoindrai (peut-être) plus loin.
Je démarre dans une nuit brumeuse et froide ; le terrain est légèrement montant, rien de bien difficile, juste de quoi se maintenir en équilibre avec la température extérieure. Tout le long de la route, on dépasse des cyclos qui dorment dans le fossé , seulement repérables par la petite lumière arrière restée allumée . Comment peuvent-ils dormir ainsi ? Certains sont si près du bord de la route qu'ils ont du s'écrouler au sol sans préavis , happés par un sommeil irrésistible et sans la moindre conscience du danger potentiel.
Ca fait peur. Mais pour l'instant je suis même surprise de me sentir bien, et plutôt bien réveillée.
C'est magnifique … nombreux sont les cyclos arrêtés …figés dans leur élan par la beauté des lieux … le symbole aussi … ce pont perdu dans les brumes entre l'eau et le ciel … j'en pleure (encore) … après cela l'entrée en ville et le pointage sont juste une formalité .
Je retrouve alors un compagnon de route du brevet 600 km de 2014 ! Rémi va faire un bout de route avec moi …il est bien entrainé, son rythme est un peu plus élevé que le mien, mais il s'accorde plus de pauses. Pendant les deux heures après Brest, nous allons cependant rouler ensemble. Il souffre d'oedème aux chevilles.
Il me propose une pause-café ou plutôt chocolat dans un joli village que nous avons traversé à l'aller : Sizun . C'est très agréable. Chemin faisant, je tends à passer moins de temps au contrôles, et à apprécier de courts arrêts au calme, où je peux en profiter pour régler de petites choses comme retirer un vêtement, déplacer des objets sur mon vélo, changer les piles de lampe, lire mes SMS et y répondre (très important !!!) , brancher la batterie sur le GPS ou le téléphone ... ou aller aux toilettes sans faire la queue !
Nous repartons en duo mais dans la montée du Roc de Trévézel, je laisse Rémi partir devant .
Je monte allégrement cette bosse (qui ne me semble pas difficile) quand tout d'un coup ...
PAF le pneu :-(
La crevaison a été brutale, et est sur la roue arrière comme cette nuit. Deux crevaisons en 100 km avec un pneu neuf, il y a un truc. Je cherche ... et je trouve ... une fente sur le côté du pneu où la chambre à air devait passer. Reste à la remplacer ... en "bouchant" le trou avec un morceau de pneu ... et espérer que ça tienne jusqu'à Carhaix.
Du coup je ne peux pas profiter de la descente. J'entends un tac tac tac ... ça roule vers Carhaix ... mais ça ne roule pas rond. Je croise Patrick qui va dans l'autre sens ! Mais impossible de lui expliquer mon histoire en 3/10 eme de seconde de croisement, alors je la garde pour moi.
L'arrivée dans la ville me parait bien longue ... et je suis bien contente de déposer mon vélo au stand technique. J'en profite pour aller pointer et faire une micro-sieste au chaud dans l'herbe. Il faut dire qu'il fait bon ... au moins 27 °C à l'ombre.
Je repars un peu trop "tranquillement". Pourtant, à ce moment, j'imagine continuer le soir au-delà de Loudéac, mais je ne prends pas vraiment conscience du temps que cela prendra et je multiplie les petits arrêts ... un diabolo citron sur la route ... une crêpe au contrôle secret ... où je retrouve Séverine !
Je suis bien contente de la retrouver car entre temps j'ai "essayé" d'autres compagnons de route, sans grand succès. J'ai même trouvé un râleur qui dit que le parcours est quelconque et que chez lui, c'est plus joli ... ben, pourquoi t'es pas resté chez toi ?
De nouveau, avec Sev, nous allons faire route ensemble, sur cette section accidentée qui précède l'arrivée à Loudéac. Et c'est un bon moment ... on a même bien rigolé ! Il y a avait du monde dans le coin dont une dame qui avait une crêpe qui dépassait de sa poche et qu'il ne fallait pas laisser partir comme ça ...
Le soleil se couche doucement ... et la nuit n'est plus très loin lorsque nous pointons à Loudéac.
J'hésite encore un peu à continuer jusqu'à Quédillac ... mais je me dis qu'il fera moins froid dans les dortoirs en début qu'en fin de nuit ... que je pourrai rouler avec Séverine ... et que si je continue je risque d'être prise de sommeil au milieu de nulle part ... alors je vais manger ma soupe et je m'arrête là ... à Loudéac.