Hésitations sous le sommet
Lundi 24 mai 2010, Vanoise, Pointe du Vallonnet (3373 m) , Ski de randonnée, 1600 m D+
Quel temps splendide ce lundi matin, tandis que nous quittons le terminus de la route au-dessus de Chambéranger, près de Pralognan la Vanoise ...
Pralognan ... il y a dix ans presque jour pour jour, je skiais la grande Casse et cette montagne mythique marquait un tournant dans ma "carrière de skieur alpiniste" comme dirait Volodia Shashahani. Skier cette grande pente m'ouvrait une porte, me rendait possible des descentes que je n'avais pas même envisagées .... pendant ces dix ans, j'ai fait plus de trois cent sorties en ski de rando, mais il y en a qui marquent plus que les autres.
Aujourd'hui, je suis de retour dans le coin pour un sommet certes moins prestigieux, mais qui constitue un objectif intéressant de ski de printemps : la Pointe du vallonnet . Le portage est très court, ce qui commence à être rare en cette saison. De plus, nous allons rarement dans ce coin et c'est l'occasion de découvrir de nouveaux paysages , comme les Dents de la Portetta avec une étonnante brèche en coup de sabre.
L'étonnante brèche de la portetta (j'aimerais bien y aller !)
Aujourd'hui j'ai faim, après avoir marché à peine 100 mètres, et même en m'alimentant régulièrement, je vais avoir faim toute la journée (sauf quand j'aurai soif ) Il y a des jours comme ça .... vers 2800 m, je suis même un peu en hypoglycémie, je m'en aperçois car je me mets à faire des micro-pauses de quelques secondes, ce que je ne fais pas normalement (sauf parfois en remontant un couloir ski sur le sac) . Heureusement, ça repart bien après avoir mangé.
Une neige dure "à cupules ": bien attendre qu'elle ramolisse au soleil !
La montée, faite de ressauts et de replats, est plutôt sereine ; une fois le refuge du Grand Bec dépassé , on pénètre dans un vallon où l'ombre recule au fur et à mesure de notre avancée.
Refuge du Grand Bec
On arrive au pied du couloir qui donne accès aux pentes sommitales. Il ne faut pas le regarder longtemps pour s'apercevoir qu'il est creusé par une profonde goulotte, et que sa base est tapissée de boules. De plus il est encore bien gelé. Oui c'est vrai il y a des contrepentes mais au-dessus d'une barre... je n'aime pas les boules, ni la neige gelée. De plus, il y a une équipe devant qui semble avoir du mal à progresser.
Bref, je commence à me dire que je n'irai pas au sommet, que ce couloir qui semble difficile à monter est peut-être horrible à redescendre, même à pied. J'enlève mon sac et je me pose là au soleil.
On est bien là Pis ce couloir, il est pô en conditions ...
Seulement les suivants ont l'air de monter facile, et puis je me connais ... quand je renonce au sommet, je m'en veux pendant longtemps ... alors je quitte la grosse boule de neige où j'étais assise, je laisse mes skis et mes peaux sur place, et je repars en crampons vers le sommet. Bonne surprise, le couloir est amusant et agréable à remonter à pied. Je regarde un skieur descendre sur de la neige encore très dure, il me fait peur .
Au dessus, il me reste une bonne centaine de mètres moins raides; je trouve une zone où la neige porte même à pied, et après pas mal d'efforts désormais en pleine chaleur, je parviens au sommet. La vue sur Grande Casse est ma récompense .
La grande casse
Je ne m'attarde pas au sommet car il me reste à redescendre à pied, ce n'est pas très difficile mais très long. Je suis en chemisette mais j'ai gardé le bandeau sous le casque, quelle erreur ! J'ai très soif mais ce n'est pas vraiment un endroit pour sortir le sac, mieux vaut regarder où je mets les pieds et où je plante le piolet. Heureusement, il y a d'énormes marches. Sur les sept personnes présentes aujourd'hui, cinq sont descendus à pied.
la descente : vers 2500 m
La suite de la descente est sans souci, sur une belle moquette ; les "cupules" ont dégelé, on les sent un peu dans les cuisses quand même. Plus bas, la neige est bien molle, on skie un peu sur l'herbe ... c'est physique mais ça permet de descendre jusqu'au sentier sans difficulté.
En plaine, c'est la grosse chaleur qui nous attend ...l'été n'est pas loin !