Quand la montagne n'est pas d'accord !
Samedi 30 avril 2011, Haute-Maurienne, ski de randonnée (800 m + 820 m D+)
La montagne avec une date prévue à l'avance, c'est un peu comme un pari, le résultat n'est pas toujours celui qu'on voudrait !
Ce raid prévu la dernière semaine d'avril devait initialement avoir lieu dans le massif du Queyras, autour du Viso. Nous avons modifié nos plans en raison d'un manque de neige tout à fait inhabituel à cette saison, l'itinéraire prévu se déroulant en majeure partie au-dessus de 2500 m .
Le choix s'est ensuite porté sur la Haute-maurienne, tout près du col de l'iseran , le secteur de l'Albaron. Certes on y trouve encore de la neige ... mais pourquoi ? parce qu'il n'arrête pas d'y neiger .... ce n'était pas vraiment l'endroit où il fallait se trouver, quand la lombarde (vent italien de type foehn) ramène les nuages sur la chaîne frontière ...
Pour cette raison, nous avons réduit la durée à trois jours, pour monter en refuge le vendredi, le jour théoriquement le moins beau.
Afin de profiter d'une éventuelle "lucarne méteo ", nous avons dormi au chalet refuge de Bonneval. Ce chalet est très propre, très bien équipé, avec du gaz et tout ce qu'il faut pour cuisiner. Comme nous étions garés à côté, nous avons pu nous faire un bon repas entre copains, sans "portage" de vivres
Vendredi
Vendredi matin, nous utilisons deux remontées mécaniques qui nous amènent à 2200 m d'altitude. C'est le dernier jour d'ouverture de la station ; celle-ci propose un forfait "randonneur" à 8 € , qui permet d'emprunter une seule fois la remontée. C'est donc grasse mat pour nous avec un départ pas avant 9 heures !
Au lieu d'aller directement au refuge, nous remontons la vallée du Vallonet avec l'idée de gravir l'Ouille du Midi, et de la traverser pour descendre vers le refuge. Mais à 11 heures, comme nous prenons pied sur le glacier inférieur du Vallonnet, le ciel se couvre et il se met à neiger en abondance !!!! La face est de l'Ouille du midi est complexe, et nous ne connaissons pas l'état de l'enneigement : pas un truc à tenter par mauvais temps .
Laure et Caro sous la neige
Nous faisons donc demi-tour et entamons une looongue traversée montante pour rejoindre le refuge des Evettes
(2591 m) les 350 m de descente ne laissent pas un souvenir impérissable, la neige n'est "pas jolie" , donne l'impression en skiant "d'écorcher quelqu'un "
Il neige mais il ne fait pas très froid,la neige mouille et ça finit par s'infilter partout ; la visibilité est très réduite. La neige "colle" tellement aux skis que nous serons trois à nous passer complètement de peaux de phoque; par contre je regretterai ce choix en fin de montée, car je dérape latéralement et à la longue, c'est très fatigant.
Laure et Antoine au chaud dans le refuge
Nous arrivons bien trempés au refuge, où deux poêles procurent une bonne chaleur pour faire sécher tout le matériel ! Agréable quand même d'avoir des vêtements au sec grâce à un sac en plastique
Une éclaircie en fin d'après-midi, laisse espérer du beau pour le lendemain
Le refuge est gardé , ce qui simplifie la logistique des repas (nous prenons la demi-pension) mais en contrepartie du confort on y trouve pas mal de bruit et d'agitation - sauf les après-midis qui sont calmes.
Nous nous endormons en espérant le grand ciel bleu au moins pour la matinée du lendemain.
Samedi
Derrière nous, c'est pas pire ...
Mais là où on se dirige on rentre dans les nuages ... et il y a TROP de neige !
C'est raté pour le ciel bleu ! Et de gros nuages accrochent toujours les sommets. Notre intention première était de traverser vers l'Italie , vers le refuge Gastaldi., par un itinéraire glaciaire à haute altitude .... mais là il y a comme un flottement dans le moral des troupes .... de plus il a beaucoup neigé la veille ... les 15 cm à l'atitude du refuge, deviennent 40 cm à 3000 m, avec les risques d'avalanche associés.
Du coup on pousse les skis dans la trace de ceux qui précèdent, ils vont vers l'Albaron .... mais à l'étage supérieur (3400-3700m) il y a beaucoup de brouillard ... les éclaircies, rares, se cantonnent à l'étage du dessous ... alors on y reste, on se dirige vers le Col du Greffier, qui par un beau couloir devrait nous ramener dans notre vallon d'hier .... car déjà on a perdu l'envie de faire un troisième jour dans ces conditions (la meteo annoncée est la même) ...
La brèche bien marquée est le Col du greffier, que l'on va traverser ... mais les éclaircies ne durent pas
Alors qu'on traverse sur une sorte de balcon d'altitude bien plat, on entend un Wouf C'est un soupir d'exaspération poussé par la neige, de l'air coincé en-dessous de nous qui vient de s'échapper ... et ce n'est pas bon signe ... les "wouf" sont associés à une situation nivologique bien douteuse ...
Une belle barre de séracs
Le col : P'tet ben que oui, ptet ben qu'non !
Neige et brouillard ...
Alors on hésite ... on avance, on grogne contre l'adversité, on discute, on revient en arrière, puis on change d'avis .... la visibilité devient un peu meilleure, on termine notre traversée vers le col du gGeffier Il est défendu par une petite pente raide (30 m) en mixte (rochers couverts de neige poudreuse) C'est Antoine qui fait le joker, et qui va installer une petite main courante ; le passage n'est pas trop difficile, ni exposé.
Passage du Col du greffier, en crampons
Caro en éclaireuse dans le large couloir
Derrière c'est un grand couloir poudreux à 40 degrés d'inclinaison, c'est Caro qui fait le "joker" . Rien à signaler, rien ne bouge . Nous descendons un par un ,pour ne pas risquer d'ensevelir les autres en cas de coulée déclanchée.
Un peu de neige tassée a empêché ma fixation de s'enclencher correctement, et au second virage je perds un ski, ce qui me fait chuter (c'est sans danger avec cette poudre, je reste sur place) , mais mon ski lui dévale le couloir heureusement il se plante dans la neige 50 m plus bas .
On dirait une flèche dans le ciel ... ou bien le stylo du Greffier ?
Une vue un peu plus "sexy" du couloir !
Et presque en bas il y a un rayon de soleil ...
Le reste du couloir se skie sans grand souci dans une neige assez lourde ; ça redevient un peu meilleur plus bas,
la balade sauve la journée , pour le raid on recommencera l'an prochain