Une nuit particulière
Mercredi 5 septembre 2012, vélo de route, 66 km, 601 m D+ en 2h52
22 h ... l'heure où je traîne habituellement sur l'ordi, voire l'heure où je vais me coucher si la journée a été rude ... mais ce soir c'est différent.
Je reçois un SMS, je me mets en tenue de vélo, je mets le matos dans la voiture et je pars me garer à Chabeuil ( et je passe pour totalement dérangée, il faut bien le dire )
Pascal au km 368 (je crois)
Cette nuit, Pascal Bride et son équipe passent près de chez moi car ils participent au Mille du Sud , un brevet longue distance d'envergure avec 15000 m D+ pour 1000 km, à boucler en moins de 75 heures. Je ne connais Pascal que virtuellement (et beaucoup d'autres connaissent aussi ce musicien cycliste ultra, dont le récit du Tortour m'a beaucoup émue, et son ami Poucet )
Je vais me débrouiller pour faire un bout avec eux (ils sont quatre) . Pas long car j'ai une réunion d'accueil le lendemain matin à 9h30, je souhaite être en avance, et j'y vais en vélo (15 km) : je ne voudrais pas non plus avoir une tête à faire peur aux élèves et aux familles.
Poucet à la fontaine de Barcelonne
A l'endroit où je me gare il y a la police qui fait sa ronde et j'ai presque la sensation de faire un truc interdit en m'enfonçant ainsi dans la nuit
Je roule très tranquillement jusqu'à Crest, les jambes un peu dures des efforts de la veille. La nuit est douce, il fait 18°C et le vent me pousse, il s'est beaucoup calmé.
A l'arrivée à Crest il y a un énorme rond point dont je fais le tour, je pense que c'est un coup à les louper, et bien sûr c'est à ce moment que se fait la jonction Je dois crier pour ne pas les voir partir dans la direction d'où je viens tandis que je termine mon tour de manège !!! Une équipe de quatre cyclistes en mode sapin de noël dans le noir : c'est superbe !
Les dix ou douze premiers kilomètres se font sur la départementale Crest-Chabeuil, une section que connaissent bien les participants des BRMs 300 km de Grenoble (inoubliable par gros vent de face !!!).
Pour moi le changement de rythme est brutal car malgré le faux plat montant de 1 à 3%, et le petit vent défavorable, ça roule, ça roule ! Le premier kilomètre je dois vraiment m'accrocher ... puis le miracle se produit, et je suis bien, très bien. Je fais connaissance avec la petite équipe de quatre personnes (Pascal, Gilles dit Poucet, Michel, Marc) engagées sur la "rolls des brevets" tout en filant à bonne allure dans la nuit. L'état de fraîcheur du groupe est impressionnant.
Au niveau du centre équestre des Pialoux, il faut tourner pour rejoindre la route de la Raye ... c'est aussi pour cela que j'ai imaginé cette sortie nocturne ... je connais PAR COEUR toutes ces petites routes .... Et de nuit, quand on n'est pas de la région, ce n'est pas si facile ... à trois reprises au moins, pas la moindre indication sur une bifurcation. Du coup je fais le guide
A l'occasion d'une pause à la fontaine de Barcelonne, nous sommes rejoints par un groupe d'Allemands. Ils ont des éclairages extrêmement puissants, on croirait voir débarquer un OVNI ... si j'avais été seule j'aurais eu peur J'ai deux gourdes de crème de marron dans les poches, j'en fais cadeau à mes compagnons car je n'en ai pas besoin, et cela leur fait plaisir : un cyclo longue distance qui va bien ne refuse pas quelques calories de rab !
Les Allemands filent dans la nuit, ils découvrent la bosse en direction de Combovin qui est assez coriace. Notre Bridou file devant et le groupe s'espace un peu, je crois que je grimpe correctement le long raidillon à 9-10%, les jambes sont totalement revenues, peut-être suis-je même un peu supersonique cette nuit Il y a aussi le fait que je sais exactement quand je peux accélérer .. ou pas.
Il s'en passe des choses la nuit dans les Monts du Matin
En bas de la descente les allemands font une erreur de parcours, on repasse devant , et peu après ...
une lumière rouge qui clignote
"CONTROLE SECRET à 300 m"
Je découvre un camion garé, une table pleine de boissons et victuailles ... Sophie et Bernard tamponnent les cartes des participants et leur offrent de la soupe, une bière ... et Sophie qui me dit "Ah j'aimerais bien avoir une femme sur le Mille du Sud" ; j'en suis toute émue.
Minuit à cet endroit, avec ces compagnons, cela a un côté irréel et magique. Drôle aussi avec Pascal qui s'excuse auprès d'un allemand avec lequel il a eu un petit différent, mais ce n'est pas le même allemand et le gars ne comprend rien du tout !!!
L'équipe a un reporter photographe !
De nouveau, après une bonne petite pause, on repart dans la nuit, Après un passage qui sans connaître pourrait être d'orientation délicate dans Peyrus, je commence à envisager mon retour sur Chabeuil . Finalement je poursuivrai jusqu'à Barbières ... et là , je franchis au milieu de la nuit ma seconde ligne de Karman *.
Satellisée dans l'espace tout noir !
Barbières, le parcours devient simple pour eux , on se dit au revoir et ils continuent vers le Vercors ... tandis que je fais demi-tour, 14 km plutôt descendants et vent de dos.Ma moyenne à l'arrivée à la voiture est de 23 km/h, malgré un aller vers Crest en mode repos et des descentes à petite vitesse, mon éclairage étant un peu juste. La partie où j'ai roulé avec la dream team a du en effet être assez rapide.
Au fond il n'est pas si tard, peut-être 2 h du matin lorsque je rentre, avec l'impression d'avoir vécu un beau rêve ... pourquoi se priver d'une belle rencontre et d'une sortie insolite ...
Pour le suivi de la fine équipe, voir ici
* seconde ligne de Karman : 200 000 m D+